Lieux de rencontres lesbiennes, Paris belle époque.

Sous ma langue, le paradis.

Comme évoqué précédemment, l’homosexualité féminine, dont le haut de l’iceberg a émergé aux yeux du monde à partir du 19e siècle, a aujourd’hui enfin, droit de citer, et fort heureusement.

Mais cet espace privé et donc discret est difficile à créer et à préserver. Les modalités de rencontre sont parfois compliquées.

Le monde lesbien reste discret et assez confidentiel dans ces pratiques, seuls quelques fantasmeurs inventent et y voient simplement leurs dessous sexuels inassouvis.

Le monde lesbien, nous devrions plutôt dire, le monde de l’homosexualité entre femmes, touche tous les milieux féminins, toutes les couches de la société féminine et elles sont discrètes ces femmes.

Si beaucoup de femmes aimeraient entrer dans cette danse, dans la réalité cela s’avère encore difficile par rapport au statut social.

En effet, nombre de femmes mariées hétérosexuelles, aimeraient pouvoir établir une relation saphique avec une autre femme. Mais pour rester discrète, c’est compliqué étant donné le mari en embuscade, prêt à s’immiscer dans cette relation pourtant purement féminine.

Liberté sexuelle entre femmes.

Souvent le mari flaire la “bonne” affaire et pousse sa compagne, sa femme, vers un plan à trois, c’est le fantasme de beaucoup d’hommes, mais quelle erreur, car dans beaucoup de cas le monsieur terminera sur la carpette, car la venue d’un tiers masculin s’accommode souvent très mal dans une relation impliquant deux femmes, la sexualité entre femmes est assez incompatible avec une présence masculine et intrusive, la nature même de la relation charnelle entre femmes, est assez contre-nature avec le masculin.

On peut aimer la confiture d’une part, et le gigot d’autre part, mais ne pas aimer les deux en même temps !

Soulignons en clair, au passage, que la bisexualité des femmes n’implique en rien la pratique du triolisme. La bisexualité englobe l’une ou l’autre des relations,  mais pas les deux en même temps !

La pratique du saphisme reste très discrète et intime aux regards des intrus.

Saphisme discret.

Ceci étant dit, le Paris de la fin du 19e siècle et début 20e siècle est le foyer du lesbianisme et la bisexualité féminine en France est bien classée et se trouve dans le peloton de tête des villes ouvertes en Europe.

Les lieux de rencontres lesbiens sur Paris pour la catégorie de femmes fortunées restent

 les salons privés, et certaines maisons conçues pour ce type de rencontre.

Mais pour les autres femmes pratiquant le saphisme il y avait des salons publics, des bars, des restaurants, des appartements, des music-hall etc…Même en ce temps là, beaucoup de salons étaient réservés pour les femmes, pas question d’y admettre des hommes, ce qui bien sûr posaient pas mal de problèmes car le mâle veut être partout chez lui, du moins le croit-il !

En 1881, Octave Uzanne écrit qu’à Paris, il y avait un très grand nombre de ferventes du saphisme et nombre de femmes de lettres , littéraires ou du théatre, bourgeoises mariées,, hétérosexuelles,ou simple femme, s’adonnaient au saphisme dans des lieux publics ou privés, et aussi chez elles avec leurs femmes de chambre assez souvent.

Léo Taxil dans son ouvrage “la corruption fin de siècle ,“affirme que des tribades sont organisées en groupes et se livrent à des orgies entre femmes sans nom.

Il y avait aussi des prostituées femmes, pour femmes et des endroits de rendez-vous réservés seulement aux rencontres entre femmes.

Rappelons que toutes les femmes de cette époque qui pratiquaient le saphisme appartenaient au milieu lettré de la capitale.

Les centres du lesbianisme bourgeois mondains se trouvaient sur Neuilly et aussi sur Saint-Germain.

Mais d’autres quartiers plus populaires étaient en vogue, comme Pigalle, quartier de Clichy, Montmartre, les grands boulevards, la rue des Martyrs, qui aujourd’hui encore exhale un parfum de marginalité.

La capitale respirait le plaisir.

Un certain nombre de brasseries parisiennes étaient comme des villages de lesbos, les filles sortaient ensemble et elles évitaient soigneusement les hommes qui comme aujourd’hui avaient des comportements peu respectueux envers les femmes.

Caresses entre femmes.

Dans certains bars parisiens, ce sont parfois des soirées de débauche entre femmes qui s’offrent à votre regard.

En fait, le lesbianisme et la bisexualité féminine ne cesse de progresser dans cette deuxième moitié de 19e siècle.

Dans le milieu du music-hall, de la chanson, il y avait un grand nombre de femmes lesbiennes ou bisexuelles.

Il est surprenant de voir en cette fin de siècle le nombre de bar, cafés, restaurants gérés par la communauté lesbienne et bisexuelle féminine.

Mais des scandales éclatent tout à coup, et ils apprennent à notre vertueuse population, qui s’en indigne, que les nobles dames n’ont pas dédaignées venir prendre part aux jeux de l’amour lesbien dans des maisons ou leur admission avait lieu au mépris de tous les règlements de l’époque.

Léo Taxil s’émeut pareillement du laxisme de la loi et rappelle en 1891, l’admission des femmes comme visiteuses dans les lupanars officiels était un cas de fermeture pour l’établissement.

Pourtant, depuis 1881, elles y sont reçues et nullement en cachette. Aux alentours des maisons de tolérances, on voit stationner souvent des voitures privées (calèche), elles ont amené des filles de théâtre.

Les plaisirs offerts aux lesbiennes peuvent en outre surprendre par leur variété et parmi les lieux où abonde le saphisme, il faut citer à Paris certaines tavernes de Montmartre, l’avenue des Champs Élysées et les abords de l’Arc de triomphe, Il y a aussi les terrasses de café à Pigalle.

Par ailleurs, il existe environ une quarantaine d’appartements tous spéciaux, dédiés au culte de lesbos et uniquement ouvert aux seules dames du monde. Pour la plupart, ils sont situés dans les environs de la Madeleine et de la Chaussée d’Antin.

Les lieux de plaisirs entre femmes furent révélés en détails par un grand nombre d’écrivains avec force détails piquants.

Plaisirs et érotisme entre femmes.

Ces lieux de rencontres ou tables d’hôtes étaient très fréquentés après le théâtre, le music-hall, les cabarets et tous les endroits ou beaucoup de femmes venaient chercher les plaisirs lesbiens.

Dans les tables d’hôtes, il y avait « Chez Laure » rue des Martyrs, puis « Louise Tallandier » dans la même rue, au numéro 17.

Colette fréquentait, vers 1930, les caves de Montmartre, car c’est ce lieu qui à cette époque, offrait le plus d’endroits de bacchanales.

Le Hanneton, le rat mort, la souris, vous accueillent à toutes heures du jour comme de la nuit.

Jean Lorrain a décrit une clientèle très éclectique.

Le Hanneton était une brasserie au 75 rue Pigalle (à l’emplacement de la brasserie du Lapin dirigée par Mme Armande).

Le rat mort, avec deux entrées, l’une sur la place Pigalle, et l’autre au 16 rue Frochot, afin de pouvoir en sortir discrètement. Colette parle de cet endroit.

Mme Palmyre dirigeait la « Souris », un café situé 29 rue Breda ( aujourd’hui rue Henri-Monnier).

Puis vers 1920 et 1930 les lieux se déplacent vers Montparnasse, là où se trouvait le « Monocle » lieu également lesbien.

Amour lesbien dans la nature.

En 1888 Pierre Delcourt évoque que ces vingt dernières années, l’augmentation des amours entre femmes est prodigieux, ces femmes considèrent le rapprochement homme/femme comme une monstruosité à laquelle il faut se soumettre pour vivre , c’est le dictat de la société et aujourd’hui encore, la norme reste l’hétérosexualité, nous sommes sous la dictature phallocratique, mais fort heureusement, nous arrivons à faire notre chemin, nous les lesbiennes et bisexuelles.

Les hommes pensent depuis des siècles, qu’ils sont incontournables pour les plaisirs des femmes, c’est une monstrueuse erreur qui encore une fois prouve que les hommes ne connaissent rien aux femmes, pourquoi y a-t-il autant de femmes mariées entretenant une relation très secrète avec une autre femme, son amante ?

Histoire d’amour entre femmes homosexuelles et bisexuelles.

Le sommet de l’érotisme, c’est le saphisme.

Il y a mille exemples d’histoires de femmes qui aiment les femmes, des histoires saphiques, des histoires entre lesbiennes dans le bon sens du mot, car ce mot « lesbienne » est trop souvent galvaudé, et utilisé de façon très péjorative, alors que c’est en fait toute la quintessence de la sensibilité, de la sensualité, de l’érotisme au féminin, aucune relation hétérosexuelle ne peut égaler ce monde de sensualité.

Je vais vous raconter une vie de femme homosexuelle hors norme, il s’agit des aventures amoureuses de Nathalie Clifford Barney.

Cette jolie femme est née au USA en 1876, c’est l’une des filles d’un riche américain dans l’Ohio.

Cette jeune femme à dés, son jeune âge vibré pour la gent féminine, à cet âge il ne se passait rien, mais les regards de Nathalie étaient sans cesse dirigés vers d’autres femmes, elle n’avait d’yeux que pour ses semblables, les femmes exerçaient sur elle une irrépressible attraction, sans qu’elle sache encore qu’elle était la nature de cette attirance.

Très tôt, elle sera attirée par les lumières de la ville, et Paris à cette époque était un espace de renouveau, de liberté, car les mœurs y étaient libres, et discrètes. Le père de Nathalie connaissait déjà le côté libertaire de sa fille, et pour cette raison, il hésita un bon moment avant de céder à la demande de sa fille, de partir en France, pour goûter aux joies libertaires de Paris.

Puis devant l’insistance de sa fille, le père céda, et laissa sa fille plier bagages, pour s’embarquer sur le premier paquebot en partance pour le vieux continent.

Le voyage se fit en compagnie de sa mère, et de sa sœur.

Des sensations à en perdre la raison, le lesbianisme est incomparable.

Le temps viendra confirmer cette envie sous-jacente, de plus, Nathalie est particulièrement séductrice avec les femmes, et plus tard, elle n’hésitera pas à entreprendre les femmes qui lui plaisaient, qu’elles soient ouvertement homosexuelles ou hétérosexuelles, d’ailleurs, ces dernières, les hétérosexuelles, lui tombaient souvent dans les bras, pour ne pas dire dans son lit.

Quant à notre séductrice, elle affichait sans fard son homosexualité, et était très fière d’être lesbienne.

Les cibles de choix de Nathalie étaient parmi la bourgeoisie, la classe des intellectuelles en vue dans le milieu mondain, car notre séductrice et conquérante avait de l’ambition.

L’une de ses conquêtes fut une mondaine parisienne, en la personne de Liane de Pougy.

Liane de Pougy, était une cocotte, une courtisane, une danseuse, qui était également très recherchée par les hommes, toujours à l’affût d’un gibier. Mais ces messieurs devaient sortir leur argent, car les plaisirs possibles avec Liane de Pougy avait un prix, et cette fantaisie était réservée uniquement pour les bourses bien remplies, l’argent reste roi dans le domaine du sexe, comme ailleurs. C’est donc en faisant le commerce de son corps auprès de ces messieurs en manque que Liane gagnait sa vie.

Mais, la jeune Nathalie qui était en relation très amoureuse privilégiée, n’entendait pas vivre cette double vie avec Liane de Pougy, comment voulez-vous que Nathalie, qui avait horreur des hommes, accepte de partager sa vie avec une courtisane, certes jolie et séductrice, mais qui faisant commerce de son corps avec les hommes, pour Nathalie, c’est incongru, inimaginable, une faute de goût.

D’ailleurs, nous pouvons nous demander comment une femme, Liane de Pougy, qui aimait beaucoup les femmes, pouvait offrir son corps à des hommes, même pour de l’argent ?

Pour cette raison, la liaison pourtant torride entre Nathalie et Liane, n’excédera pas la durée d’un an, car l’orage grondait en permanence dans ce couple de femmes, avec des scènes de jalousie à répétition, c’était une relation pour le moins tumultueuse.

L’usure du couple existe aussi entre femmes, c’est alors que Nathalie lasse des frivolités de sa compagne Liane, alla à la rencontre d’autres femmes, dont Renée Vivien,

Néanmoins, Liane de Pougy gardera toujours un excellent souvenir de son amante Nathalie, et d’ailleurs Liane de Pougy rédigera un livre, à ce sujet, dont le titre est « Idylle Saphique », qui relate sa passion homosexuelle amoureuse avec Nathalie. Ce fut un succès littéraire, que l’on peut toujours lire aujourd’hui.

Il en fut de même avec Renée Vivien, qui écrira aussi des ouvrages, dont, Études et Préludes en 1901.

Les relations amoureuses entre femmes, ne sont pas toujours apaisées, et sont également empreints de jalousie, et de tumulte.

Ce qui fut encore le cas entre Nathalie et Rénée Vivien, qui malgré un voyage sur l’ile de Lesbos, se soldera par une séparation dramatique, et Renée Vivien raconte cet amour dans l’un de ses livres, dont, « Une femme m’apparut »

Nathalie, cependant jalouse et exclusive, n’hésitait pas à sortir avec plusieurs femmes sans en dire mot à aucune d’entre elles, mais les femmes ne sont pas folles, et si certaines acceptent la situation, d’autres se rebellent.

Cette situation ne manque pas d’attirer des rancœurs et de la jalousie, propre aux histoires d’amours passionnelles.

Mais en 1909 Renée Vivien décède suite à une maladie, aggravée par la toxicomanie, et l’alcoolisme, c’est la fin tragique de cette relation amoureuse.

Notre Nathalie est affamée de relations amoureuses entre femmes, elle va collectionner ses relations homosexuelles.

Nathalie profite de son pouvoir de séduction pour attirer les femmes dans son lit, comme Eva Palmer, Olive Custance, Colette, Emma Calvé, Henriette Roggers, Mata Hari, la liste est longue, car Nathalie accumule les conquêtes, sans compter les femmes d’un soir très nombreuses.

La beauté des femmes.

Elle fréquenta aussi Lucie Delarue Mardrus, connue pour ces poèmes merveilleux.

Puis, avec le décès de son père, Nathalie hérita d’une petite fortune, ce qui lui permet d’acheter une résidence à Paris au 20 rue Jacob, cet endroit sera le point de rencontre des relations homosexuelles de Nathalie, et tous les grands noms de la bourgeoisie féminine parisienne passera par cet endroit, lieu de tous les possibles dans les relations homosexuelles entre femmes, les parties fines entre femmes y étaient courantes.

Les hommes, comme Remy de Courmont, toujours à l’affût des lesbiennes, feront des pieds et des mains pour approcher Nathalie, mais rien n’y fera, les relations avec les hommes sont proscrites avec Nathalie, pourtant certains y ont dépensé des fortunes pour tenter de conquérir Nathalie, c’est bien mal connaître les lesbiennes.

Parmi les femmes préférées de Nathalie, il y avait la femme peintre, Romaine Brooks, avec laquelle elle vivra très longtemps.

Si la relation amoureuse entre Nathalie et Liane de Pougy fut assez courte, elle n’en sera pas moins intense, brulante et tumultueuse, d’ailleurs Liane de Pougy rédigera un ouvrage « Idylle Saphique », qui relate en grande partie cette aventure amoureuse entre deux femmes folles l’une de l’autre.

Dans les années 1910, Nathalie partagera sa vie amoureuse avec  la peintre Romaine Brooks, lesbienne, née à Rome en 1874 sous son nom de jeune fille Béatrice Romaine Goddard. Puis Romaine épousera en 1903 un musicien pianiste, lui-même gay, pour respecter les conventions de cette époque, mais ils établissent un accord comme quoi, ils ne divorceront jamais, et ne vivrons jamais ensemble, en contre-partis de quoi, Romaine ayant fait un gros héritage de son grand-père, versera à son pseudo mari une pension.

L’union Romaine et Nathalie durera plusieurs années, et le 7 décembre 1970 Romaine Brooks décédera à Nice.

Liane de Pougy vivra jusqu’en 1950, et finira par se marier avec un homme, qui n’est autre que le Prince Georges Ghika, ce qui permettra à Liane de Pougy de vivre à l’abri du besoin et aussi de voyager dans le monde sans souci matériel, mais également aussi sans amour. Quant à Nathalie Barney, elle vivra jusqu’en 1972, et s’éteindra a Paris à l’âge de 96 ans.

Histoire lesbienne de femmes qui aiment les femmes.

Les plaisirs de l'homosexualité entre femmes.

Avez-vous lu le livre de Mathilde Ramadier, ayant pour titre évocateur « Vivre fluide », ou déjà s’inscrit en filigrane une revendication tout à fait naturelle pour nous les femmes, c’est-à-dire avoir enfin la liberté de choisir notre vie sexuelle. Mais pour aller plus loin, les choses peuvent être plus compliquées, car il y a encore des freins à certains types de rencontres, surtout si elles sont teintées d’intentions homosexuelles entre femmes, si les femmes revendiquent la liberté de choisir, alors, elles sortent d’une société hétéronormée, phallocratique, un sacrilège !Notre société est conditionnée par des siècles d’une dictature religieuse bien pensante et certaine de détenir la vérité en la matière. De plus, les hommes ont fait main basse sur la liberté des femmes, certains de leur pouvoir, et persuadés d’être le centre du plaisir. Si encore de nos jours, l’homme pense être au centre du bateau plaisir, alors, il se trompe magistralement, c’est une grave erreur, c’est du nombrilisme, du phallocentrisme. Revenons en arrière dans le temps, celui de la prise de conscience, par les femmes, du droit tout simple, d’accéder enfin à la liberté de vivre comme nous le voulons.

Nous avons le droit de choisir nos vies sexuelles, nous ne sommes pas des objets ! L’éclosion féministe commence véritablement après la première guerre mondiale de 1914-1918…

La liberté féminine arrive enfin ! Après la première guerre mondiale de 1914-1918 le monde ouvre les yeux et voit le résultat des horreurs que seuls les hommes sont capables de faire. Des millions de morts, de blessés, de mutilés, d’aliénés mentaux devenus fous sous le déluge de feu que le ciel a fait tomber sur eux, des champs entiers sont couverts de tombes, et bien heureux ceux ayant une sépulture, des militaires, des civils, hommes, femmes et enfants payent le prix du sang. Combien de familles endeuillées, combien d’orphelins, combien de femmes ne retrouverons jamais l’être aimé, il a donné sa vie, ou plutôt l’histoire est venue lui voler sa vie, il n’ira plus aux champs faucher le blé. La vie va reprendre, c’est le sens des événements, la vie est plus forte que la mort. Les femmes, ont, elles aussi, largement contribué à l’effort de guerre, elles ont travaillé dans les usines à fabriquer des bombes destinées aux voisins d’en face. Et réciproquement bien sûr. C’est alors que va naître un mouvement de fond chez les femmes, le féminisme, qui jusque-là était souterrain, donc confidentiel. L’émancipation des femmes est la rançon de ce qui leur est dû, la liberté dont elles sont privées depuis des temps immémoriaux.

La première des libertés revendiquées dans les années folles de 1920 à 1940 et encore après, sera la liberté sexuelle, le droit de choisir sa sexualité, de revendiquer les plaisirs qui jusque-là étaient réservés au genre masculin, le monde étant phallocentré, comme si le phallus de l’homme était un passage obligé pour nous les femmes d’avoir du plaisir. Mais après cette guerre, c’est le réveil des sens, une frénésie du bonheur s’empare d’une classe intellectuellement ouverte sur le monde qui s’offre à eux. Les cafés, les cabarets, les restaurants, s’emplissent d’hommes et de femmes qui veulent en découdre avec les interdits sociétaux. Mais ce phénomène touche surtout une catégorie de gens, la bourgeoisie parisienne, la capitale devient le centre de la luxure.Les coquins et coquines sont à la fête dans ce Paris, ou tous les chats sont gris, tout est possible. Et les escapades sexuelles fleurissent comme au printemps.Les femmes prennent leur envol, l’homosexualité féminine arrive au grand jour, de même que la bisexualité entre femmes, des grands noms de la société s’affichent sans vergogne pour montrer à la face du monde, voyez, nous faisons ce que nous voulons maintenant, et nous découvrons des plaisirs jusque-là cachés.

Les lesbiennes et les femmes bisexuelles osent désormais se montrer, et revendiquer la découverte des plaisirs sexuels entre femmes, et c’est une immense révélation. Des grands noms comme Nathalie Clifford Barney, Gertrude Stein, Sylvia Beach, Colette et bien d’autres, vont s’afficher ouvertement en compagnie de leur compagne du moment, certaines d’entre elles vont d’ailleurs vivre une véritable histoire d’amour entre femmes, nous en reparlerons plus tard, car c’est simplement du merveilleux. Nous avons connaissance de ces histoires d’amours entre femmes, grâce à diverses correspondances et ouvrages littéraires écrits pas certaines autrices des faits. Il y a aussi des rapports des institutions policières et juridiques également. Le développement de l’homosexualité et de la bisexualité entre femmes est surtout à cette époque visible dans le milieu artistique et intellectuel. Il y a aussi un fort mouvement de libertinage féminin sexuel dans la classe populaire, qui se produisait déjà durant la guerre elle-même, Mais il est plus difficile à quantifier, car il reste confiné sur une catégorie de la population, qui ne s’exprimait pas sur ce sujet demeuré très tabou. Ma grand-mère, une ouvrière, disaient que dans son quartier ouvrier sur Paris, elle savait que des femmes couchaient avec leur voisine de palier, et ce n’était pas si rare que ça, des rencontres tricots sur le lit n’étaient pas un événement. Mais ce genre de rencontre entre femmes était vraiment sous le sceau du secret, tant le quand dira-t-on populaire était en embuscade, et prêt à bondir sur le moindre événement, avéré ou non d’ailleurs. Cependant, que ce soit dans les milieux bourgeois ou plus modestes, la phraséologie était encore pleine d’allusions pour désigner ou parler des femmes qui sortaient avec des femmes, le mot “lesbienne” était un gros mot, ce qui semble être encore le cas de nos jours. D’ailleurs, si vous tapez “lesbienne” sur google, vous n’allez pas tomber sur des bandes dessinées pour ado, mais immanquablement sur des sites destinés aux adultes, c’est une insulte ouverte au monde LGBT, les gens bien d’un côté, les montres de l’autre, voila un monde bien manichéiste.Les femmes homosexuelles et bisexuelles se trouvent dans une bonne partie de la société bourgeoise et bien pensante, incluant des protestants, des catholiques et d’autres religions, le sexe n’a pas de croyance.L’église est comme toutes les institutions de ce monde, elle a des thèmes et des pratiques.En théorie, elle condamne à l’enfer, ce pécher de chair. En pratique, elle leur donne l’absolution et les envoient au paradis. (In La prostitution devant le philosophe. 1881- Charles Richard) Oui, les lesbiennes partent bien au paradis comme le disait d’ailleurs Colette, ces plaisirs que l’on nomme à la légère “physique”, vont bien au-delà et que le cœur et l’esprit y participent tout autant..

Une relation entre femmes, n’est pas que physique, elle s’accompagne d’une merveilleuse alchimie composée d’un savant et mystérieux mélange de sororité, d’amitié, d’admiration, de douceur, de poésie. C’est en fait un signe de maturité dans une société pleine de préjugée et parfois opprimante. Il faut savoir aussi que la bisexualité chez les femmes ne conduit pas à une appartenance sexuelle, cela va de soi.Au 19e siècle, le terme le plus courant pour parler des femmes bisexuelles ou homosexuelles était plutôt “amitiés féminines”, terme plus générique qui permettait de faire un peu office de paravent cachant un peu ce que l’on voulait y mettre.Puis au début du 20e siècle, le corps médical concluait que la société “normale” était incontestablement l’hétérosexualité, et classait donc de ce fait les autres sexualités dans la case “atteinte psychique” d’où des thérapies de conversion pour revenir dans la norme sociétale du moment. D’ailleurs, à ce sujet, le célèbre mathématicien Alan Turing, qui à découvert le code secret de l’armée allemande durant la dernière guerre mondiale, en craquant le chiffrage de la machine “enigma”, était homosexuel, alors après la guerre, la société anglaise lui proposa, en lui forçant juste un peu la main, de subir une thérapie de conversion pour devenir hétérosexuel, mais voila Alan Turing ne supporta pas ce cocktail de folie, et il finit hélas par se suicider dans les années 50. L’Angleterre se décida à présenter des excuses à cet homme qui fut un très brillant scientifique, et rendit un immense service non seulement à son pays, mais au monde entier évitant de saigner encore un peu plus l’humanité. Cette perte magistrale montre combien il est difficile d’être différent, pas une tête ne doit dépasser du rang, il ne faut pas être trop grand, et pas trop petit non plus sous peine de devenir invisible. La norme, encore en vigueur dans beaucoup d’esprit, reste malgré tout l’hétérosexualité, le genre masculin domine le monde avec son phallus, croyant à tort qu’il est bien le seul pourvoyeur du plaisir pour nous les femmes. Mais voilà, ne pas confondre procréation, ou l’intervention du phallus “peut” être nécessaire, et plaisir sexuel. Si ce plaisir est au bout du rapport sexuel pour l’homme, il n’est en rien garanti pour nous les femmes. Les années folles qui accompagnent la libération des femmes démontrent que la sexualité entre femmes procurent bien plus d’orgasmes, plus fréquents, plus intenses, c’est le nirvana de la sexualité, ceci est un véritable pavé dans la mare des plaisirs sexuels. Ce mythe, confortablement installé depuis des générations, tient aussi à l’illusion entretenue par les femmes qui simulent l’orgasme lors de leur rapport hétérosexuel avec leur mari ou leur compagnon, en effet des enquêtes sur ce sujet montrent que 47% des femmes simulent régulièrement l’orgasme, pourtant 81% des hommes croient leur que partenaire n’a jamais feint de jouir avec eux, les soupirs ne valent pas toujours plaisirs orgasmiques: et cette ruse est bien souvent mise en place pour une raison alarmante, qui est d’écouter le rapport sexuel. 91% des femmes ont déjà simulé l’orgasme, c’est le chiffre révélé par Gleeden à l’occasion de la journée mondiale de l’orgasme du 21 décembre 2006, par l’association anglo-saxonne “The Global Orgasm”, et 11% des femmes simulent la jouissance à chaque rapport sexuel. Un vrai jeu d’acteur en fait. Pourquoi les femmes simulent-elles l’orgasme ? Pour faire plaisir à leur partenaire. Elles cherchent en fait à booster l’égo de leur partenaire pour ne pas le vexer. Mais aussi, et malheureusement, pour écourter le rapport sexuel.

Sensualité lesbienne.

Une autre facette de la sexualité féminine, mise à l’étude en 2018, par le Psychologue USA, Justin J. Lehmiller, sur un échantillon de 4175 femmes, montre que 59% des femmes disent avoir des fantasmes sexuels avec d’autres femmes, ce qui vient confirmer de précédentes études faites une dizaine d’années auparavant, ce qui vient confirmer que les femmes ont une sexualité plus fluide que les hommes.

Cependant, peu de femme osent avouer leur bisexualité au grand jour, car nous restons hélas dans une société très hétéronormée. La bisexualité des femmes reste aussi un grand fantasme masculin, ce qui les poussent souvent à proposer à leur femme ou leur compagne, le fameux plan à trois, mais quelle erreur encore, car l’approche sexuelle des relations entre femmes n’a absolument rien à voir dans ses actes avec l’approche masculine.  La sexualité de la femme est tout en subtilité, et passe par son cerveau. Si la presse féminine fait périodiquement l’apologie de la sexualité lesbienne, en mettant en avant que les femmes ayant des rapports sexuels avec d’autres femmes, ont des vies plus épanouies, car les enquêtes font états de “plaisirs inouïs”, avec des orgasmes en cascades.

Les lesbiennes seraient maitresses dans l’art et la manière, comme l’évoque d’ailleurs un texte du début de notre siècle dont l’autrice est une admiratrice de Sappho, en la personne de Lucie Delarue Mardrus. Hommes et femmes, nous avons les mêmes mains, mais il semble que les lesbiennes soient maîtresses en l’art et la manière. Le magazine féminin “Elle” ne disait-il pas dans l’un de ses articles “Jouis comme une lesbienne”, c’est déjà une ode et une invitation aux plaisirs entre femmes.

Les lesbiennes ont plus d’orgasmes. En effet, Une étude américaine publiée en 2017 par Kinsey institute sur un échantillon de 53.000 personnes, montre que 86% des femmes homosexuelles disent atteindre l’orgasme, contre 65% des femmes dans les rapports hétérosexuels. Cette différence ne se retrouve pas chez les hommes, car les hommes hétérosexuels disent atteindre l’orgasme dans 95% des cas, tandis que les hommes homosexuels jouissent dans 89% des cas, il y a donc peu de différence chez les hommes. La palme de l’orgasme revient de ce fait sans discussion aux femmes ayant des rapports entre elles. Le malentendu dans l’art et la manière, car 30% des hommes pensent que la meilleure façon de parvenir à l’orgasme pour une femme est la pénétration vaginale. Et 91% des lesbiennes disent atteindre l’orgasme en combinant stimulation génitale et sexe oral, sans être  pénétrée au niveau du vagin d’ailleurs.En fait, les femmes peuvent prendre leur temps, parce qu’elles n’ont pas l’obligation de maintenir une érection à tout pris, c’est le couperet de l’éjaculation. Les femmes ayant eu un orgasme peuvent continuer aussitôt vers d’autres orgasmes. Il y a une sorte d’injustice dans la nature elle-même, mais ne faudrait-il pas une autre éducation ? Revenons à nos années folles de 1920- 1940

Quand deux femmes s’aiment, tout est possible.

Cette période folle, voit l’émergence de la garçonne, femme libre, mais d’un milieu bourgeois, fréquentant le Paris select de l’époque où le champagne coulait à flot. La garçonne s’impose comme le nouveau modèle féminin des années 1920/1930. En effet, comme je le disais au début de mon blog, après la première guerre mondiale, les femmes viennent occuper le centre de l’échiquier des libertés féminines, elles veulent affirmer leur indépendance dont elles sont privées depuis des générations, les hommes dictant le comportement des femmes en privé et dans la société, la femme était la chose de l’homme ! L’homme est sujet, la femme est objet….(Simone de Beauvoir, “le deuxième sexe”) Cette indépendance, cette émancipation féminine se voit dans la vie, par la nouvelle mode “garçonne” qu’un certain nombre de femmes émancipées arborent sans vergogne au nez et à la barbe d’un monde qui les avaient ostracisé depuis fort longtemps. La mode garçonne se traduit, dans les faits, par une coupe de cheveux plus courte, donnant ce  nom  à la couleur androgyne, à la femme qui en est porteuse. Puis les femmes adoptent une silhouette plus mince, longues jambes, poitrine plus discrète. La presse ne tarde pas à emboiter le pas en arborant des publicités offrant des corsets permettant de contenir quelques rondeurs non encore maîtrisées. Les cheveux sont courts, couverts par un chapeau très élégant, quant aux pieds, ils sont aussi de la fête, et les souliers à talons bas soulignent cette nouvelle mode.

La cosmétique fait une apparition très remarquée sur les marchés et les grands magasins qui profitent largement de ce nouvel élan, il y a du soufre dans l’air me direz-vous ! Les femmes s’initient à l’art du maquillage, leur permettant ainsi de soustraire aux regards quelques imperfections ou traces du temps. Le sport devient également une prise des femmes pour entretenir sa forme et garder une ligne attractive. La mode des cheveux courts avait été lancé par Joséphine Baker et les Dolly Sisters. Mais cette nouvelle mode n’est pas du goût de tout le monde, elle dérange la société bien pensante, c’est une mode décadente disent certains. Une fois de plus c’est la religion qui vient mettre son nez là, ou elle n’a rien à y faire. C’est une atteinte notoire à la liberté de chacune. En 1921 de nombreuses ligues féminines chrétiennes lançaient un appel aux grands couturiers et aux grands magasins, contre cette mode jugée “inconvenante”. Par exemple, l’Union des œuvres féminines, (à destination des grands magasins et grands couturiers de Paris) écrivait ceci: Nous vous prions de nous aider à mettre un terme à l’inconvenance et à l’immoralité des modes actuelles.

1°) En ne créant ni en ne vendant aucun modèle qui blesse la morale

2°) En abolissant l’usage du décolleté déplacé, de l’étroitesse et de la courtesse exagérée des jupes, en prohibant l’emploi abusif des étoffes transparentes.

3°) En supprimant dans les toilettes tout ce qui sent le débraillé et le vulgaire…

Certaines femmes tirent également à boulets rouges sur les soins de beauté et la cosmétique. Malgré ces critiques virulentes, agressives parfois, la mode garçonne trace sa route assumant tout simplement le mouvement d’indépendance des femmes en général..